Quand on voit le diable partout : étude de cas et plaidoyer pour une justice ecclésiale préventive.

« La justice dans l’Église commence par la dignité des plus petits. », Mme Aïcha Gbandi

Introduction

De la délivrance à l’exclusion

Dans l’histoire de l’Église, les abus les plus profonds n’ont pas toujours été commis par les ennemis de la foi, mais parfois par ceux qui, animés de bonnes intentions, ont dévié de la voie du discernement.

Des figures prophétiques comme le cardinal Suenens, le pape Benoît XVI, ou encore des pasteurs réformateurs comme Watchman Nee ont rappelé la nécessité de discerner les esprits, mais aussi de protéger les fidèles vulnérables contre les dérives spirituelles, les abus d’autorité et les pratiques contraires à l’Évangile.

C’est dans cet esprit que s’inscrit la présente analyse. Juriste de formation, bergère du Renouveau charismatique catholique, et fondatrice de l’École Théofania, je vous propose une étude de cas réelle et actuelle, qui questionne la frontière entre discernement spirituel et dérive autoritaire.

Tous les prénoms ont été modifiés pour respecter la confidentialité des personnes mentionnées. Ce récit s’appuie sur des faits réels.

I. Étude de cas : Quand le groupe de prière rejette sa propre servante

Mlle D, jadis active et responsable, devient progressivement un sujet de soupçon

Longtemps engagée, Mlle D. occupait diverses fonctions dans son groupe de prière charismatique : coordination d’activités, déplacements pour représenter les bergers, soutien aux plus jeunes, participation à des sessions de délivrance, et même appui logistique à des projets éditoriaux. Elle était la “servante idéale”, toujours disponible, toujours appelée.

Mais un jour, tout bascule.

L’isolement commence

Elle est désocialisée, progressivement écartée des cercles décisionnels. Le berger, sa femme, Mme Y., M. F. : tous commencent à la tenir à distance, à la suspecter, à rire d’elle. Elle devient le sujet des railleries, une cible d’insinuations sur sa santé mentale.

Mme A., la psychologue du groupe, insiste :

« Tu es possédée. Laisse le Saint-Esprit entrer. »

Mme Y. et M. F. la harcèlent de messages en glossolalie, comme si le démon était caché dans son silence.

Une violence croissante

Un jour, le berger en vient à former des coups de poing pour exercer une violence physique sur Mlle D. Une scène inqualifiable. Mlle D. s’interpose pour ne pas être physiquement atteinte. L’atmosphère spirituelle devient une zone de guerre psychologique et verbale.

Le téléphone comme exutoire

La contrainte était démesurée : on l’obligeait à se conformer à un processus de conversion et de délivrance imposé, remettant sans cesse en cause ses progrès. Chaque jour, on lui demandait si elle était entièrement délivrée, si son cœur était totalement ouvert à l’Esprit, au point qu’elle ne pouvait plus se concentrer sur aucun autre aspect de sa vie : insertion professionnelle, carrière, ministère, projets personnels, vie sentimentale ou emploi.

Un soir, poussée à bout par ces exigences, alors qu’on la pressait de confesser ses liens, ses démons et d’abandonner ses pratiques et objets spirituels, elle appelle ses “accompagnants spirituels” et leur dit :

« Je vais boire le Sang. »

Eux, au lieu de l’écouter ou de s’inquiéter, martèlent une glossolalie intense et bourdonnante au téléphone. Elle rit :

« Vous êtes des bornés, vous voyez le diable partout. »

Plus tard, elle appelle le berger et le responsable d’intercession :

« Venez enlever le démon de mon corps, puisque vous dites que je l’ai. »

La rumeur : “Elle est folle”

Dans les couloirs du groupe de prière, la femme du berger murmure à d’autres membres :

« Oubliez cette fille, elle souffre de troubles mentaux. »

Et pourtant, Mlle D. était la première à répondre présente, envoyée dans des missions pastorales, appelée pour diriger les prières les plus sensibles, sollicitée pour accompagner des publications musicales et littéraires.

“Mais lorsque le cadavre commence à sentir, on le jette par la fenêtre.”
“Quand tout va bien, on acclame. Quand ça se détériore, on isole.”

Mlle D. n’est qu’un échantillon de ces jeunes femmes vulnérables – parfois illettrées, souvent issues de milieux précaires – qui subissent des abus spirituels dans le silence des Églises.

II. Lecture ecclésiale : quand le zèle remplace la compassion

Une obsession démoniaque

Certes, le démon existe, et le pape Paul VI nous a mis en garde contre la tentation moderne de nier son existence. Mais aujourd’hui, l’erreur opposée s’est installée : voir le diable partout.

Blessures intérieures ≠ possession démoniaque

Certaines personnes souffrent émotionnellement, d’autres présentent des carences affectives, une absence de repères, ou des troubles de la personnalité. Cela n’est ni une possession, ni une œuvre des ténèbres. C’est un cri du cœur blessé.

C’est le Saint-Esprit que nous devons invoquer – non pas pour chasser un démon imaginaire, mais pour guérir ce qui est réellement brisé.

Les fruits de l’Esprit comme boussole

« Le plus grand miracle n’est pas de chasser les démons, mais de manifester les fruits de l’Esprit. » – Galates 5,22

La patience permet d’écouter l’autre sans panique spirituelle.
La maîtrise de soi empêche d’user de violence, de mépris ou de dérives verbales.

III. Lecture juridique : de l’abus spirituel à la dérive sectaire

Abus de faiblesse et autorité spirituelle mal exercée

Faire pression sur une personne vulnérable, l’accuser de possession, l’isoler psychologiquement est une forme d’abus de faiblesse (art. 223-15-2 du Code pénal).

Harcèlement moral collectif

Les railleries, les moqueries répétées, les campagnes de disqualification peuvent être qualifiées de harcèlement moral, surtout lorsqu’elles sont exercées par une autorité (berger, membre du noyau, pasteur).

Dérive sectaire

La MIVILUDES identifie comme dérive sectaire :

• Isolement social

• Ingérence spirituelle

• Humiliation sous couvert religieux

Tout ce que Mlle D. a subi entre dans ces catégories.

IV. Réponse pastorale et formation : l’École Théofania

Une formation essentielle

Face à ces réalités, l’École Théofania, que j’ai fondée, propose une formation complète :

• Dérives sectaires et santé mentale dans l’Église

• Approches juridiques, pastorales et psychosociales

• Méthodologie de médiation inter ecclésiale

Cette formation repose sur des expériences concrètes, des analyses documentées et une approche combinant droit canonique, droit civil, éthique pastorale et dynamique communautaire.

Objectifs de la formation

• Comprendre les frontières entre blessure, trouble et possession

• Encadrer les prières de délivrance

• Classer les charismes et les fruits de l’Esprit selon une summa divisio

• Favoriser l'écoute, l’éthique et la prévention des conflits

Public concerné

• Responsables de groupes de prière

• Bergers, prêtres, pasteurs

• Juristes, psychologues et éducateurs chrétiens

• Toute personne engagée dans un ministère de service

L’objectif : prévenir les erreurs, protéger les faibles et rendre l’Église plus juste et humaine.

Conclusion

Pour une église discernante, protectrice et guérie

L’Église n’est pas une arène où l’on chasse les démons à tout-va, ni une institution qui sacrifie ses serviteurs sur l’autel du silence.

Elle est la maison de la miséricorde, l’hôpital des âmes blessées, le lieu où les dons doivent s’ordonner à l’amour.

Cette formation constitue une réponse pédagogique, prophétique et juridique pour équiper les responsables, rétablir la justice et redonner la paix aux cœurs blessés.

Inscrivez-vous à la formation ici